En vingt ans, les taux d’activité des femmes et des hommes se sont considérablement rapprochés. Cette avancée a logiquement contribué à diminuer les inégalités entre les deux sexes. Elle aurait dû dans le même temps réduire les inégalités entre ménages. Or il n’en a rien été. Comment l’expliquer ?
Pour résoudre l’énigme, il faut s’immerger dans les données fiscales et sociales de la statistique publique de 1996 à 2015, en examinant tour à tour les revenus des individus et des ménages, en raisonnant avant et après la redistribution publique opérée via les transferts socio-fiscaux. Une étape intermédiaire mérite une attention particulière : c’est la « redistribution privée », c’est-à-dire la mise en commun des ressources au sein d’un ménage. La prise en compte de cette étape souvent négligée apporte un nouvel éclairage sur les tendances sociodémographiques à l’œuvre.
Si l’impact positif de la hausse de l’emploi féminin sur les inégalités de niveau de vie se confirme, il apparaît cependant plus que contrebalancé par deux phénomènes concomitants. D’abord la baisse de la part des couples et l’augmentation des familles monoparentales et des personnes seules, qui accentuent les inégalités globales. Ensuite une montée de l’homogamie de revenus, qui tend à accroître la polarisation sociale et la proportion de ménages pauvres. Les pouvoirs publics doivent intégrer l’impact de ces facteurs sociodémographiques à toute réflexion sur les réformes de l’État-providence, pour trouver les meilleures parades à ces nouveaux risques sociaux.
Source : France Stratégie
Publication : La note d’analyse, n°71, novembre 2018