Vie chère en Martinique : Une réalité sociale alarmante
Lors d’un déplacement récent en Martinique, Hervé Guéry a été témoin de l’ampleur du mouvement social en cours, centré sur la problématique de la vie chère. Toutefois, ce mouvement dépasse largement la question des prix, révélant des enjeux profonds tels que les inégalités sociales et un sentiment persistant d’oubli historique au sein de la population martiniquaise.
Des prix exorbitants, un quotidien difficile
Le coût de la vie en Martinique est saisissant, particulièrement en comparaison avec celui de l’Hexagone. Quelques exemples relevés dans un supermarché d’une commune parmi les plus pauvres de l’île illustrent cette réalité : 6 € le kilo de pommes de terre, 3,35 € pour un litre de lait bio, ou encore 12,7 € pour une boîte de petit salé aux lentilles. Les produits locaux ne sont pas épargnés, avec des tomates de Martinique à 7 € le kilo.
Cette flambée des prix est amplifiée par l’inflation, particulièrement forte dans les Outre-mer, et par la hausse des coûts de transport depuis 2020. Les ménages aux revenus modestes, notamment les familles, peinent à accéder à ces biens essentiels, aggravant une précarité alimentaire déjà préoccupante.
Une pauvreté deux fois plus élevée qu’en métropole
Le taux de pauvreté en Martinique est deux fois plus élevé que dans l’Hexagone, et le coût élevé de la vie s’étend au logement. Selon les indicateurs du Compas, les ménages les plus vulnérables cumulent ainsi des difficultés liées à l’alimentation et au logement.
Dans ce contexte, le travail des Centres Communaux d’Action Sociale (CCAS) martiniquais est crucial. Depuis mai 2024, ces structures ont initié plusieurs actions en réponse aux besoins urgents identifiés par une Analyse des Besoins Sociaux (ABS) mutualisée menée auprès de 21 CCAS de l’île.
Des initiatives pour une alimentation accessible
Malgré des moyens limités, les CCAS ont proposé des solutions concrètes pour améliorer l’accès à une alimentation équilibrée pour les plus démunis :
- Intégration de produits frais dans les colis alimentaires et les épiceries sociales.
- Développement de jardins partagés, en utilisant notamment des terrains laissés à l’abandon.
- Soutien aux seniors isolés, incapables d’entretenir leurs jardins, pour une réactivation de ces espaces de production.
- Création d’un “DALO alimentaire”, une forme de sécurité sociale de l’alimentation, permettant de garantir un minimum vital en matière d’accès à des produits sains.
Ces initiatives, menées en collaboration avec des acteurs locaux et nationaux comme VRAC, visent à offrir des solutions durables, même si une baisse des prix de 20 % reste insuffisante pour éradiquer la précarité alimentaire.
Une problématique partagée par d’autres DOM
La situation martiniquaise est similaire à celle d’autres Départements d’Outre-mer, notamment Mayotte, où près des trois quarts de la population sont exclus de l’accès à une alimentation diversifiée en raison des prix prohibitifs. Dans ces territoires, les ménages les plus pauvres subsistent grâce à des produits de base comme le riz, les pilons de poulet achetés en gros, et les brèdes, plantes comestibles cueillies dans la nature.
Les CCAS, piliers de l’action sociale en Martinique
Les CCAS jouent un double rôle essentiel : celui d’alerte sur les problématiques sociales, et celui de réponse concrète aux besoins des populations. À travers l’ABS et les initiatives locales, ils démontrent leur capacité à innover malgré les contraintes budgétaires. Leur mobilisation souligne l’importance d’une solidarité accrue et d’une action concertée pour lutter contre les inégalités exacerbées dans les territoires d’Outre-mer.
Face à une situation où la vie chère devient un obstacle quotidien pour une grande partie de la population, ces efforts méritent un soutien renforcé et une reconnaissance nationale.